Presentation
En partenariat avec l'association Ville Ouverte, nous donnerons chaque été, une carte blanche à une artothèque afin qu’elle puisse présenter aux Parisiens une «toute petite partie» de leur collection. Nous voulons ainsi rendre hommage au travail réalisé par la quarantaine d'artothèques situées dans toute la France et qui jouent un rôle vital dans la diffusion de l’art contemporain. Paris, une fois n'est pas coutume, ne bénéficiant pas de ces équipements exemplaires…
Cette année, nous commençons avec l’artothèque de Caen, animée par Claire Tangy, qui a constitué depuis 1986, une collection de 2 500 oeuvres, tous supports confondus.
Une sélection d’une vingtaine d’oeuvres issues de ses collections autour de l’Intime et du Quotidien, sera accrochée sur les cimaises des Douches La Galerie.
Œuvres de Martine Aballéa, Pierre Ardouvin, Alain Biet, Etienne Bossut, Anne Brégeaut, Isabelle Cornaro, David Barriet, Sébastien Gouju, Anne Hämäläinen, Astrid Kruse-Jensen, Ville Lenkkeri, Musée Khômbol, Paul Pouvreau, Silvana Reggiardo, Magdi Senadji, Yves Trémorin.
Communiqué de Presse
La dimension du quotidien
Chaque jour, les œuvres du fonds de l’artothèque de Caen quittent l’espace public pour investir l’espace privé. Chambres, salons, cuisines, bureaux accueillent en leur sein les œuvres de cette collection publique à usage intime ; bien commun, partagé par des centaines d’individus, qui font le choix de se donner le temps du quotidien pour faire connaissance et vivre avec l’art.
C’est cette dimension du quotidien, centrale dans le fonctionnement de l’artothèque, qui a guidé le choix des œuvres constituant l’exposition présentée à la galerie Les douches.
Natures mortes, objets usuels, vanités, mais aussi lieux de vie intimes – habités ou désertés, composent le parcours de cet hommage rendu au quotidien, par seize artistes.
Depuis l'Antiquité, l'objet jalonne l'histoire de la peinture jusqu'à constituer un genre à part entière avec la mode de la nature morte au XVIe : chargés d'une dimension symbolique, les divers objets appartenant au registre de la nature morte constituent des supports de méditation et renvoient à la notion de Vanité. Qu’ils interrogent le temps et la vanité humaine face à sa condition, ou bien qu’ils rendent un simple hommage à la dimension quotidienne de nos vies, les artistes présents dans cette exposition ont recours à un répertoire iconographique et formel varié et renouvelé.
Certains d’entre eux manient l’humour, voire la dérision. Ainsi, Pierre Ardouvin, dans une œuvre intitulée « Dis-moi » revisite le mythe de Narcisse à l’aide d’une simple bassine de plastique rouge et d’un miroir. Paul Pouvreau organise ses images comme des mises en scène réduites d’objets quotidiens, empreintes de poésie et de malice. Martine Aballéa et Astrid Kruse Jensen flirtent avec le mystère et l’étrangeté dans de troublantes scènes nocturnes, propices à laisser l’imagination s’emballer. Yves Trémorin, dans une série intitulée Natures mortes, souligne l’ambivalence des choses du quotidien : aussi belles que repoussantes. Avec la précision de l’archiviste, Musée Khômbol procède à une description minutieuse de valises, les décrivant sous toutes leurs coutures, les accompagnant de diverses annotations, tour à tour poétiques, humoristiques et métaphysiques, sous le titre générique La dimension du nécessaire. Isabelle Cornaro compose de précieux paysages à l’aide de bijoux… A première vue, Sébastien Gouju épingle dans une boîte d’entomologiste de simples papillons… Le regard attentif discernera, dans un second temps, une série de petits copeaux de bois, rebuts obtenus par la taille de crayons…
Détourné ou fidèlement représenté, l'objet est à l'honneur : valises, louches, crayons, miroirs, paniers, couverts... Un véritable inventaire à la Prévert qui témoigne de l'extrême variété des propositions artistiques actuelles.
Claire Tangy
Directrice de l’Artothèque de Caen
Artothèque de Caen - Une collection en mouvement
Inscrire l’art dans le quotidien,
Créer de nouvelles conditions d’avènement et d’existence de l’art,
Interroger les modes de diffusion et de réception de l’œuvre d’art,
Favoriser la production et la circulation d’œuvres multiples,
Aller à la rencontre d’un vaste public…
Voilà 25 ans que l’artothèque de Caen développe son projet à partir de ces différents axes. Le souci du dialogue et du croisement en constitue le cœur. Lieu d’échange, de rencontre, de mise en confrontation et de révélation, l’artothèque donne vie à des projets d’artistes et offre au public la possibilité de les expérimenter. La volonté est ici, clairement, de favoriser un lien direct entre l’artiste, l’œuvre et l’individu, d’instaurer une relation à l’art qui se vive dans la durée.
L’art capte les résonances et les pulsations profondes du monde. Il en propose des représentations. À ce titre, il offre à chacun l’occasion d’interroger la société dans laquelle il évolue et de se questionner soi-même. L’art ne sert pas, il révèle à soi. C’est pourquoi l’artothèque s’adresse à des individus, auxquels elle propose de vivre tranquillement avec des œuvres, d’en faire l’expérience intime.
L’engagement constant de ses partenaires (Ville de Caen, Conseil général du Calvados et DRAC de Basse-Normandie) à ses côtés constitue un pilier incontournable du caractère durable de son action qui s’inscrit dans un temps qui ne peut se confondre avec celui de l’événement.
11 OCTOBRE 1986 : L’EXPÉRIENCE ESTHÉTIQUE OFFERTE À TOUS
Dans le cadre d’une convention passée entre la Ville et le Ministère de la Culture et de la communication, la Ville de Caen ouvre une artothèque dans son théâtre municipal. Elle propose alors au public une collection riche de 200 œuvres.
Étonnement, incrédulité, mais aussi curiosité et intérêt alimentent les réactions à un tel projet. Ainsi l’on s’apprête à prêter des œuvres d’art... À qui, pour quoi faire, comment, sous quelles conditions ? Les questions sont nombreuses. Un tel concept bouleverse bien des idées reçues sur l’art et sa transmission.
Le samedi 11 octobre 1986, les premiers amateurs ou simples curieux sont ponctuels au rendez-vous. À l’issue de leur visite, c’est les bras chargés qu’ils regagnent leurs domiciles, pressés d’y installer les œuvres avec lesquelles ils partageront, deux mois durant, un morceau de leur vie.
Une nouvelle façon de s’approprier l’art vient de naître à Caen.
Près de 500 expositions dans et hors les murs, 200 artistes invités, 40 éditions d’œuvres d’art, une soixantaine de catalogues publiés, 80 000 prêts, 700 000 visiteurs et 25 ans plus tard... L’Artothèque de Caen, riche d’une expérience singulière, construite patiemment à distance du tumulte événementiel, est désormais identifiée comme une référence nationale. Occupée quotidiennement à tisser de durables liens entre l’art et les individus, elle offre aux œuvres de multiples moyens d’entretenir une dimension dialectique avec la vie, avec la réalité du monde.
Au fil du temps, on a cessé de s’étonner du fait que des œuvres d’art puissent circuler aussi simplement sous la forme de prêts... En France, le modèle a essaimé : on ne comptait qu’une quinzaine d’artothèques à la création de celle de Caen, il en existe une quarantaine aujourd’hui. Elles se sont regroupées, sous l’impulsion de l’artothèque de Caen, au sein de l’ADRA, Association de Développement et de Recherche sur les Artothèques. L’ADRA est elle-même membre du CIPAC (Congrès Inter Professionnel de l’Art Contemporain).
UNE COLLECTION NOMADE
La collection de l'artothèque de Caen est composée de plus de 2000 œuvres, signées de quelque 800 artistes. En constante évolution, ce fonds est constitué de façon à permettre un ancrage dans l'histoire récente de l'art et à ouvrir simultanément un dialogue entre cette histoire et la création actuelle ; sont ainsi acquises des œuvres créées entre la fin des années cinquante et aujourd'hui, par des artistes significatifs de la scène artistique internationale ou nationale et représentatifs des principaux mouvements apparus au cours de ces années. ??Toutes les œuvres sont choisies de façon collégiale par un comité d'acquisition composé de professionnels de l'art contemporain.
Véritable clef de voûte de l’artothèque, ce fonds est l’ambassadeur d’une importante action de diffusion. Prêts aux particuliers, aux entreprises, aux collectivités ou aux scolaires constituent bien sûr le volet le plus emblématique de cette action. Ainsi, c’est une population d’environ 20 000 personnes qui est concernée au quotidien par la présence d’œuvres, sur des lieux de vie allant de l’intimité de la sphère privée à l’espace de travail. Le nomadisme de la collection ne s’arrête cependant pas là, puisque des expositions itinérantes, constituées à partir du fonds, circulent dans divers lieux de la Région Basse-Normandie : centres culturels, hôpitaux, établissements scolaires, etc. Construites selon des thématiques variées, ces expositions donnent à lire dans toute sa cohérence un fonds qui se constitue au fil du temps par échos et rebonds successifs, dans une continuité toujours de mise.
Le quart de siècle de l’artothèque de Caen permet aujourd’hui à cette collection de compter un certain nombre d’œuvres qui ont déjà acquis un caractère historique fort. Bien que sa mission première reste la transmission, elle n’en constitue pas moins un patrimoine important à l’usage de tous.