Le monde de Sabine Weiss

18 Mai - 30 Juillet 2016

Presentation

Il serait présomptueux de notre part de prétendre donner une vision exhaustive du travail de Sabine Weiss dans cette première exposition personnelle que la galerie Les Douches lui consacre. En effet, depuis 1942, l’œuvre de Sabine Weiss n’a cessé de s’enrichir. Elle aborde tous les genres, sans aucune exclusive.

Aussi, nous nous sommes plutôt attachés à mettre en avant des aspects moins évidemment connus de sa personnalité. Nous sommes allés la chercher à New York et partout où son œil nous surprend. Certes Sabine Weiss aime photographier les enfants, mais limiter Sabine Weiss au monde de l’enfance serait une grave erreur. Elle refusera toujours l’anecdote au profit de la sensation, « celle qui consiste à capter l’expression des sentiments ».  Quant à l’étiquette de « photographe humaniste », si elle ne la réfute pas, elle lui semble bien réductrice. D’autant plus que ce courant n’a pas influencé sa manière de voir. Femme inclassable et farouchement indépendante, passionnée de peinture, Sabine Weiss est toujours là où on ne l’attend pas.

Dossier de presse

Communiqué de Presse

Sabine Weiss n’est pas photographe.

En tout état de cause Sabine Weiss n’est pas une photographe que l’on peut aisément classer dans la photographie humaniste française puis aller se coucher comme si de rien n’était, comme si la messe était dite. Et ceci n’est en aucune manière une critique de ladite école de photographie. Une simple constatation, un état de fait, un état des lieux. Et ce, quand bien même ses photographies parisiennes semblent pour nombres d’entre elles s’inscrire parfaitement dans cette mouvance. Mais voilà bien là le secret, Sabine Weiss ne doit surtout pas être perçue comme une photographe de Paris. En tout cas, pas uniquement. Sabine Weiss n’est jamais plus elle-même que lorsqu’elle quitte la France. Jamais plus elle-même que lorsqu’elle se retrouve (se trouve) à New York, en Sicile, au Portugal ou en Égypte. D’accord, en France Sabine Weiss peut être considérée comme une photographe. Mais sitôt un pas franchi hors de l’hexagone et c’est une toute autre histoire...

Mais alors, si Sabine Weiss n’est pas photographe, qu’est-elle ? Qui est-elle ? Loin de ses bases, Sabine Weiss devient metteur en scène, réalisatrice de films. D’ailleurs j’opterai plus volontiers pour le terme de réalisatrice en ce qui la concerne car précisément ses photos ne sont pas mises en scène. Elles ne sont pas posées. Pas même des arrêts sur image. Non, ces photos sont le début d’une histoire. Ou son milieu. Ou sa fin. Et souvent elles sont un film tout entier. On rentre dans une photo de Sabine Weiss comme on rentre au cinéma. Il faudrait payer sa place pour voir les photos de Sabine Weiss. D’ailleurs, on devrait les voir à plusieurs, dans une salle obscure, sentir ses voisins réagir et vibrer à la vue de chacun de ces moments, aussi denses que dramatiques.

Le cinéma de Sabine Weiss m’évoque de prime abord le cinéma néo-réaliste italien, le Rossellini de Rome, ville ouverte ou le de Sica du Voleur de bicyclette. Puis, à la réflexion, je pencherais plus encore pour Jules Dassin. En effet c’est Dassin qui le premier, dans The Naked City, posa sa caméra dans les rues de New York. Mais pour la qualité de ses noir et blanc, j’associerais surtout les photos new-yorkaises de Sabine Weiss à cet autre film de Dassin, Night and the City. Quelle intensité ! Quelle lumière !  Le drame à l’état pur. Pas étonnant que Sabine Weiss ait elle aussi tourné ses photos dans le cœur des années cinquante à New York.

Oui, je crois sincèrement que c’est ainsi qu’il nous faut maintenant relire les photographies de Sabine Weiss. Comme de grands moments de cinéma. Et en cela elle est tout à fait à part dans l’histoire de la photographie française. Et pour ce qu’il en est, dans l’histoire de la photographie tout court. Elle y tient à jamais une place absolument singulière.

Oui, Sabine Weiss est une grande photographe.

 

Olivier Beer

Scénariste